Premiers coups de pédale pour « Par ici les pourris », le projet de collecte à vélo des biodéchets à Strasbourg

Écrit par sur juillet 25, 2018

Le jeudi 12 juillet a eu lieu la soirée de présentation du projet « Par ici les pourris », lancé conjointement par l’association Bretz’selle et Start-up de territoire. L’idée est simple : collecter à vélo et grâce à une remorque à assistance électrique, les biodéchets produits par les restaurateurs strasbourgeois, qui n’ont pour le moment pas de solution de valorisation de ces déchets verts. Le projet en est encore à ses prémices mais nombreux ont été les Strasbourgeois à se montrer intéressés. 

On ne pouvait trouver cadre plus approprié pour la présentation du projet : en plein cœur du quartier de Koenigshoffen à Strasbourg, à l’écart de l’axe passant de la route des Romains, la Tour du Schloessel et son petit parc attenant fournissaient un cadre idyllique.

Près d’une trentaine de Strasbourgeois se sont rendus le 12 juillet à la soirée de présentation du projet « Par ici les pourris », lancé par l’association Bretz’selle et le programme Start-Up de territoire de l’association Le Labo, qui soutient et accompagne la création de projets citoyens innovants en Alsace.

Le projet est simple : mettre en place des collectes de biodéchets auprès des professionnels, comme les restaurants ou les bars, qui ne disposent pas à Strasbourg de solution adaptée. Les collectes seraient assurées dans un premier temps par des bénévoles, selon un rythme fixé avec les restaurateurs, via des vélos-remorques à assistance électrique fournis par la société allemande Carla Cargo.

Une fois tous les biodéchets collectés, des bacs à compost, installés spécialement pour le projet, recueilleraient ces déchets verts afin de les transformer en compost.

Pour Joakim Couchoud, l’un des principaux porteurs de « Par ici les pourris », l’enjeu d’un tel projet tourné vers les professionnels est de taille :

Pendant la soirée de présentation du projet, la trentaine de participants ont été invités à réfléchir ensemble à ce qui pouvait être fait pour lancer l'initiative. (Photo EB - Les Défricheurs)
Pendant la soirée de présentation du projet, la trentaine de participants a été invitée à réfléchir ensemble à ce qui pouvait être fait pour lancer l’initiative. Communication externe, synergie avec les associations déjà présentes sur le terrain, modèle économique… Les pistes de travail étaient nombreuses. (Photo EB – Les Défricheurs)

Les producteurs de plus de dix tonnes de biodéchets sont obligés de les valoriser, et ils se tournent vers des solutions industrielles qui sont relativement satisfaisantes. Le problème, c’est pour tous les producteurs qui ne produisent pas autant de biodéchets, et les jettent dans leur poubelle noire, avec les « déchets résiduels ». Ces déchets sont ensuite soit enfouis, soit incinérés. Et c’est dommage car ils peuvent être pleinement valorisés !

D’autant plus que les professionnels visés par le projet « Par ici les pourris » auraient un intérêt financier – et commercial – à faire appel à ces collectes de biodéchets, selon Joakim Couchoud :

Les restaurateurs qui sont assimilés à des ménages, donc les plus petits, paient une taxe d’enlèvement des ordures ménagères, qui est fixe. Ces restaurateurs n’ont donc pas d’intérêt financier à réduire leurs déchets. Les autres, ceux que l’on cible, paient une redevance spéciale en fonction de la taille de leur bac à ordures et de la fréquence d’enlèvement des poubelles. L’enjeu est là : ils peuvent, grâce à nous, soit réduire la taille de leur bac, soit avoir une collecte en moins chaque semaine, donc payer moins auprès de la collectivité. Et puis l’objectif c’est de mettre en lumière cette action de valorisation des biodéchets auprès de leur clientèle. C’est une stratégie de démarcation, qui on le pense, peut être efficace auprès des consommateurs !

Les restaurateurs ne sont cependant pas les seules cibles de Joakim Couchoud et de l’association Bretz’selle : sont également visés les fleuristes, producteurs de volumes importants de biodéchets, mais également les espaces professionnels comme les bureaux ou les restaurants d’entreprise, par exemple.

Le service proposé par « Par ici les pourris » ne serait cependant pas gratuit : les remorques à assistance électrique utilisées pour transporter ces biodéchets à vélo coûtent tout de même la bagatelle de 4 000 euros. Pour que l’activité soit viable, Joakim Couchoud prévoit une facturation au nombre de collectes et à la tonne – le barème restant cependant « à déterminer ».

La remorque à assistance électrique, fabriquée par la société allemande Carla, permet une grande maniabilité et peut être également tirée aisément à la main, permettant de se faufiler dans les ruelles étroites de Strasbourg, assure Joakim Couchoud. (Photo EB – Les Défricheurs).

Une « étude d’action » entre janvier et août 2019

Joakim Couchoud et Agnieszka Koziol, qui épaule le projet au sein du programme Start-up de territoire Alsace, reconnaissent que le projet en est encore à ses balbutiements : la soirée du 12 juillet, en plus de présenter le projet à des Strasbourgeois curieux, avait pour but de rassembler un premier cercle de bénévoles qui voudraient s’investir.

Prochaine étape pour « Par ici les pourris » : une « étude d’action » menée entre janvier et août 2019 pour étudier la faisabilité du projet au niveau du compostage : Joakim Couchoud explique qu’un rendez-vous est prévu avec Françoise Bey, élue à l’Eurométropole de Strasbourg en charge de la collecte, la gestion et la valorisation des déchets, notamment pour déterminer où seront installés les bacs de compostage.

La soirée de présentation du projet, jeudi 12 juillet, avait lieu à Koenigshoffen, aux abords de la Tour Schloessel, qui accueille également un café associatif depuis l'été 2017. (Photo EB - Les Défricheurs)
La soirée de présentation du projet, jeudi 12 juillet, avait lieu à Koenigshoffen, aux abords de la Tour Schloessel, qui accueille également un café associatif depuis l’été 2017. (Photo EB – Les Défricheurs)

Autre piste de travail : le financement du projet. Des demandes de subvention ont d’ores et déjà été déposées, notamment auprès du FSE (Fonds social européen, qui soutient des projets créateurs d’emplois et de cohésion sociale en Europe) et de l’Eurométropole de Strasbourg, via son appel à projets « Objectif Z » (« Zéro déchet, zéro gaspi ») lancé en avril 2018, qui pourrait financer le projet à hauteur de 20 000 euros.

Joakim Couchoud et l’association Bretz’selle comptent bien en tout cas s’inspirer d’autres projets similaires en France, tels que La Tricyclerie à Nantes, Les Alchimistes à Paris, ou encore Compostons à Montpellier.

Plusieurs restaurateurs strasbourgeois ont d’ores et déjà indiqué être intéressés par la démarche – l’objectif, pour le projet, étant d’atteindre une quinzaine d’établissements d’ici l’année prochaine, pour donner les premiers coups de pédale dès janvier.